PARACELSE-CINQ TRAITÉS
PREMIER TRAITÉ
De la différence des temps et que,
selon eux, toutes les forces
et faiblesses se transforment.
Pour philosopher de la différence
des temps et du changement des forces et faiblesses, il faut d'abord savoir que
le temps, au long de l'année, est inégal et que toutes les forces se transforment
selon lui, augmentent et diminuent, comme la lune, et tournent comme une roue;
tantôt en bas, tantôt en haut, puis à nouveau en bas — comme un mouvement sur
une horloge en marche qui va et vient perpétuellement, monte et descend comme
les étoiles et signes du firmament qui sont inégaux à toute heure. Car
autrement est le printemps, autrement l'été, autrement l'automne, autrement
l'hiver. Ainsi aussi avec les mois : autrement janvier, autrement février,
autrement mars et ainsi avec tous les mois. De même sont à comprendre le jour
et la nuit : autre le matin, autre le midi, autre le soir, autre la mi-nuit. Et
comme un temps est différent d'un autre, ainsi l'un est-il meilleur ou pire que
l'autre. Même chose avec la lune : différente la nouvelle lune, différent le
premier quartier, différente la pleine lune, différent le dernier quartier et
toutes les forces se transforment et changent d'après cela. Vous avez un
exemple et vous le voyez avec l'hiver, lequel apporte neige et glace, mais pas
le printemps qui, au contraire, dévore et chasse ce qu'apporte l'hiver. Ainsi
le printemps change la glace et la neige en eau, c'est pourquoi il humidifie et
rend le sol mou et souple. Mais cela, l'été ne le fait pas parce qu'il
dessèche. Et l'automne a un autre effet. Et puisqu'on ne peut pas le
contredire, il s'ensuit que tous les temps ne sont pas bons pour bêcher la
glaise et l'argile, fendre ou abattre le bois, et beaucoup moins bons encore
pour ramasser des herbes, cueillir des fruits, déterrer des racines ou
recueillir des baumes et des gommes car tout doit avoir lieu dans son temps
balsamique, compte tenu des mois, de la lune et des signes et
particulièrement du moment du jour.
Mais quel est le véritable temps balsamique
en qui les forces sont gardées comme la mumie l'est de la putréfaction?
C'est d'abord, parmi les quatre temps de l'année, l'automne qui est le
meilleur; et parmi les mois, septembre et octobre. Si l'on considère la lune,
le mieux est le déclin, immédiatement dans les derniers trois jours et au petit
matin dans le commencement du jour. Et de même que l'homme travaille le jour et
se sent fatigué et sans forces après ce labeur — et la nuit, lorsqu'il a
accompli sa tâche, il aime bien son repos et son sommeil — ainsi aussi tous les
fruits et plantes de la terre, racines et herbes. Car tous les fruits qui
poussent de la terre œuvrent avec le soleil et reposent et dorment avec la
lune. Et tout comme l'homme se porte mieux et manifeste plus de vigueur après
un sommeil suffisant, ainsi sont aussi les fruits : après minuit, non avant ou pendant
la journée. Et avec eux nous avons un exemple s'ils sont cueillis et coupés
dans un temps balsamique, ils se conservent beaucoup plus longtemps et
pourrissent moins que d'ordinaire. Et chaque fruit qui a été cueilli après
minuit ou avant le lever du soleil se maintient le plus longtemps. Ainsi aussi
dans les signes terrestres [du Zodiaque], le Taureau, la Vierge et le
Capricorne et dans le déclin de la lune, comme il est dit plus haut. Car en ces
temps il n'y a pas de luxuriance ou trop d'humidité dans tous les fruits et
toutes les plantes de la terre, luxuriance et humidité qui sont causes de
pourriture et de déperdition de force. Cela, les paysans en ont l'expérience et
n'y manquent pas.
Mais pour que tu voies que cela est vrai,
apprends-le par un exemple : coupe un morceau de bois d'un arbre, quand
celui-ci est encore en terre, en un temps balsamique, comme susdit; puis dans
un autre temps qui est contraire (dans un signe d'air ou d'eau, comme les
Gémeaux, la Balance, le Verseau, le Cancer, le Scorpion ou les Poissons; ou
bien dans la lune ascendante, ou dans la nouvelle lune; ou bien encore pendant
la journée, après midi, ou quand le soleil se couche) coupe aussi une branche
du même arbre, de taille identique et soupèse ces deux morceaux. Tu verras
alors que le premier, celui que tu as coupé en un temps balsamique est plus
menu et plus léger dans son humidité, que l'autre. Ainsi en est-il de tous les
bois. Et tout bois qui sera coupé ou abattu dans les signes balsamiques, comme
nous l'avons. dit, et sera utilisé pour bâtir ou pour tout autre usage — et non
seulement pour être brûlé ou pour faire du feu — on n'y trouvera point de
vermine et il ne sera pas habité par les vers; il ne pourrira point rapidement
et durera plus longtemps.
Ainsi aussi faut-il l'entendre avec la
glaise, l'argile et pour bêcher la terre. Car une glaise ou une terre qui a été
bêchée pendant un temps balsamique est la meilleure qu'on puisse employer au
feu, et tous les instruments — creusets et fours — qui sont faits avec elle
sont plus valeureux dans le feu. Et beaucoup plus de choses, comme ici, sont à
comprendre.
Théophraste BOMBAST von Honhenheim
Ermite souabe
dit Paracelse le Grand
Philosophe très-savant
dit Paracelse le Grand
Philosophe très-savant